Lorsque que j’ai commencé à écrire ce blog il y a quelques mois, c’est parce les évènements de la vie ont réveillé en moi (merci Lafayette !) cette âme qui somnolait depuis mon dernier accostage il y a maintenant cinq ans. J’étais devenu depuis quelques années un marin à terre, comme cela finit souvent par arriver aux bipèdes amarinés qui se font rattraper par le cycle des escales de la vie.
Marin à terre oui, mais jamais vraiment marin sans mer. Elle ne reste jamais loin de la maison. Un petit coup de voiture, et la voilà. La grande, l’océan, la belle, la bleue. Ouf, je respire : elle n’a pas disparu.
Beaucoup de terriens qui, de toute leur vie, n’ont jamais mis – et ne mettront jamais – un pied sur une coque de noix éprouvent aussi le même sentiment : ce besoin de voir la mer, là, toute proche, de savoir cette finitude de la terre juste à côté d’eux. C’est rassurant. Et comme eux, je ne peux pas imaginer vivre trop à l’intérieur des terres. J’ai besoin de la savoir à côté de moi, pour toujours.
Je ne peux pas vraiment expliquer pourquoi. C’est comme ça. Il y a quelque chose avec la mer de tellement attirant, d’originelle. C’est comme si tout venait d’elle. Racines liquides de notre âme et notre cœur. Elément amniotique salé. Elle est le commencement et la fin. Elle est éternelle.
J’aime beaucoup ces mots de Baudelaire : « Homme libre, toujours tu chériras la mer ! ».
Oui la mer nous rend libres en tant qu’hommes. Son immensité nous offre un horizon infini de possibilités. Même si toutes les terres de notre planète ont déjà été explorées, la découverte personnelle de nouveaux mondes par la mer reste encore un des privilèges du marin. Depuis la plage avant avec les boscos durant la manœuvre précédant l’accostage, c’est souvent dans la lumière éblouissante du soleil levant qu’il ressent ce frisson à la vue de ces côtes nouvelles. Ou bien sur la passerelle, dans le calme du quart de nuit qui retient l’équipage au chaud, c’est sur la carte marine puis le radar que le timonier discerne les traits nouveaux d’une terre pleine de promesses.
Et alors que la mer nous offre cette liberté, nous revenons sans cesse vers elle, comme amarrés par une aussière ombilicale invisible. Figure maternelle et rassurante. Après le vacarme et le rythme effréné de l’escale et de tous ses excès, le marin retrouve enfin sur la mer son reposant roulis qui berce. Et la paix. Cette paix de ne voir que du bleu et rien que du bleu sur 360 degrés d’horizon.
La pureté aussi. Le marin laisse derrière lui, en passant la coupée, tous ses péchés plus ou moins avouables. En retrouvant enfin la mer plus au large, il récupère un semblant de virginité, qu’il s’empressera, bien sûr, de perdre de nouveau dès la prochaine relâche à terre. Mais ce n’est pas grave. Car la mer pardonne au marin comme à un enfant un peu trop turbulent, chamailleur et toujours aventurier. C’est le propre de la mer. Sainte protectrice de tous ces agneaux saouls et égarés. Elle sait, le temps d’un transit, d’une mission, ou d’une marée, les remettre sur un sillage droit et un peu plus vertueux. Sans le savoir, c’est pour cela que le marin revient toujours vers elle.
Son courroux n’a pas d’égal ni de limites. La mort attend ceux qui n’y prennent garde. Le marin le sait et respecte la mer comme une divinité. Il navigue sur ses flots en acceptant qu’elle puisse à n’importe quel moment le rappeler en son sein. Ce n’est pas de la peur ni de la crainte, simplement une fatalité acceptée. Le marin vient de la mer et y retournera un jour. C’est comme ça. Elle est le commencement et la fin. Elle est éternelle.
« C’est pas l’homme qui prend la mer, c’est la mer qui prend l’homme. »
Moi ma mère, j’me souviens, elle est partie un vendredi …
Une tempête soudaine t’a emportée,
Me laissant marin orphelin depuis.
Mais il me reste la mer jolie,
Et la promesse de ton éternité.
Repose en paix ma chère Maman.
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on pense fort à toi pour ce moment difficile nos prières t’accompagne.
nous t’embrassons